Vers la démocratie : construire une société parallèle

1. Stratégie d'émancipation

1.1. Préalables et définitions

Démocratie = pouvoir du peuple. La démocratie on en est très loin. Dans une société composée d'individus atomisés, les gens n'ont quasiment plus aucune possibilité d'influer sur leur destin. Nous vivons sous un régime de ploutocratie ou d'"oligarchie libérale" (Castoriadis), d'ailleurs de moins en moins "libéral" au fur et à mesure qu'il est plus contesté. Voir notre page L'Europe (néo)fasciste est en marche.
La démocratie suppose l'existence de citoyens. Citoyen = personne qui est capable de gouverner et d'être gouvernée (Aristote). Loin de l'"individu" plus ou moins aliéné des dites "démocraties libérales". L'idéologie dominante ("individualisme libéral") a pour fonction de légitimer l'ordre social et de faire croire aux individus qu'ils sont libres : son credo : "chacun fait ce qui lui plaît".

 

"Ne laissons surtout pas la société dans l'état où nous l'avons trouvée."
Denis Langlois, Slogans pour les prochaines révolutions, Seuil, 2008.

Passer de l'oligarchie à la démocratie suppose une révolution. Laquelle suppose la transformation des individus en citoyens.


Gébé, dans L'an 01 (1972)

Toute révolution suppose l'inversion d'un rapport de force (ici, entre le peuple et les exploiteurs). Cette inversion nous en sommes encore bien loin (les organisations de défense populaire ayant été laminées - ou s'étant compromises). Seule la force des idées peut la construire. Elle nécessite des formes d'organisations collectives. Le fait que le capitalisme a atteint ses limites et le changement de système technique créent aujourd'hui des conditions révolutionnaires (lire notre page sur la fin du capitalisme).
La révolution ne sera pas une prise du pouvoir rapide et violente (le temps des révolutions par les armes est révolu : supériorité écrasante de la technologie et de l'équipement militaires - abandonnez les rêves romantiques !). Elle s'effectuera possiblement par le remplacement progressif des structures totalitaires par des structures démocratiques issues de la base. Etablir la démocratie ne signifie pas "prendre le pouvoir", cela signifie abolir le pouvoir (au sens de pouvoir de domination des uns sur les autres).

"Ne renversons pas l'Etat, laissons le tomber !"
Denis Langlois, Slogans pour les prochaines révolutions, Seuil, 2008.

1.2. Les sources du pouvoir dominateur

Les structures totalitaires tirent leur pouvoir de l'adhérence* et de la participation du plus grand nombre (complicité volontaire ou non, clientélisme).

*On distinguera adhésion et adhérence. L'adhésion étant l'accord conscient d'une personne à une idée ou un système, l'adhérence étant le concours non conscient qu'une personne apporte (par son mode de pensée et ses comportements) à un système. L'idéologie (qui formate et canalise les modes de pensée, à l'insu des personnes) a notamment pour effet de créer cette adhérence. Ainsi nombre de militants se définissant comme "anti-capitalistes" adhèrent en fait sans s'en compte au système qu'il dénoncent.

Il est probable qu'une désaffection progressive les affaiblisse, permettant à mesure l'instauration d'une organisation démocratique de la société. Ce désengagement passe par une prise de conscience (c'est le but poursuivi par la diffusion de nos analyses et par l'opération grand public "l'été sans épilation") et par la connaissance de solutions alternatives et le développement d'un savoir-faire accessible au plus grand nombre (c'est le but des fiches pratiques présentées plus bas sur cette page).

Autres aspects psychologiques de la domination : les exploiteurs tirent aussi leur pouvoir de la peur (le sentiment d'insécurité généralisé : peur des agressions, peur du chômage, peur du futur, catastrophisme...), du sentiment d'impuissance (le fatalisme) et de l'incapacité à l'autonomie (éducation répressive et infantilisante). La vulnérabilité des individus sera d'autant plus grande que pèse sur eux la répression sexuelle. La domination est toujours soutenue par les gens atteint de peste émotionnelle.

Autres aspects sociologiques de la domination : "L'union fait la force". Les exploiteurs sont peu nombreux mais ils sont très unis. Il ont une forte conscience de classe (ce concept a disparu du vocabulaire médiatique de façon à contribuer à l'éliminer de la pensée populaire). Aujourd'hui il n'y a plus guère que la bourgeoisie pour pratiquer la lutte des classes !

"La guerre des classes existe, c'est un fait, mais c'est la mienne, la classe des riches, qui mène cette guerre, et nous sommes en train de la gagner."
Warren Buffett*, dans le New York Times, le 26 novembre 2006.

* l'homme le plus riche du monde en 2008 (son capital est alors estimé à 62 milliards de dollars. Source : Forbes magazine).

Leur force tient aussi au fait qu'ils ont érigé le capital économique - celui qui fonde leur domination - en unique instrument de pouvoir, en marginalisant le capital culturel jusqu'à le rendre méprisé par les classes populaires (normalisation de l'anti-intellectualisme via les médias).

Le capital culturel, en effet, "principe dominé de domination" (Bourdieu) perd de sa valeur effective de capital donc de sa capacité à constituer un contre-pouvoir. Par exemple : destruction de l'école publique, professionalisation au lieu d'éducation, absence de perspective d'avenir pour les diplomés d'université, dévalorisation de la "culture inutile" (philosophie, lettres) au profit de la technologie "efficace", etc.

L'argent permet notamment la possession ou le contrôle des médias de masse (diffusion et filtrage de l'information et légitimation de l'ordre social), le contrôle de l'économie de masse (grande industrie, technologies de pointe, emplois rémunérés), l'usage de la force et l'orientation des développements de la connaissance, asservie aux usages technologiques. La destruction de toute connaissance permettant l'autonomie (celle qui permet un rapport non marchand aux choses, les savoir-faire), de toute connaissance permettant l'émancipation (savoir penser) au profit des seules sciences appliquées, c'est à dire de la connaissance permettant de générer de la valeur marchande et permettant le contrôle des populations.

La domination s'appuie sur trois formes de ressources (selon Bourdieu) : le capital économique, le capital social ("carnet d'adresses") et le capital culturel. Les dominés sont pauvres économiquement, relationnellement (isolés) et culturellement (ignorance, prêt-à-penser et divertissements).

Enfin, les efforts pour changer la société sont détournés (divertis) de différentes façons :

1.3. Orientations stratégiques

Compte-tenu de ce qui précède, stratégiquement, il est donc nécessaire :

Construire la démocratie c'est donc construire au quotidien des structures et des pratiques alternatives, des relations solidaires et plus globalement une contre-culture populaire. Cette construction est un effort collectif.

Tout ceci ne peut se réaliser qu'en mobilisant la libido qui permet la démocratie du travail. La révolution sera une jouissance partagée ou ne sera pas.

Une autre piste : l'instauration de la démocratie directe par une révision constitutionnelle.

2. Pratique

Nous vous proposons une série de fiches pratiques, plus ou moins détaillées, évolutives et non exhaustives.
Ces fiches ne nécessitent aucune connaissance ou expérience préalable, elles contiennent des liens pour vous documenter de façon plus approfrondie.

Introduction : Connaissance et pouvoir : les savoirs-faire, enjeu de la démocratie.

Sommaire : toutes les fiches en projet

Consultez également ces sites complémentaires :

Vos contributions seront les bienvenues (nous contacter ou proposer vos projets à la discussion sur notre forum).
Voici quelques règles pour proposer une fiche pratique :

  • Ne pas faire double-emploi avec des informations qui sont déjà accessibles sur Internet : mettre un lien vers ces informations. Il y a souvent pléthore d'information sur Internet : un travail de sélection et de synthèse est fort utile. Une fiche de synthèse sur un sujet donné peut consister en la présentation commentée d'une série de liens.
  • Conserver à l'esprit l'orientation stratégique de ces fiches (cf. §1.3 ci-dessus) : il s'agit d'aider à construire une société démocratique. Donc seront privilégiées les solutions qui ne passent pas par les acteurs dominants (grande distribution, technologies avancées, etc.) Ce point constitue l'originalité de ce projet.
  • Les actions préconisées doivent être à la portée d'un grand nombre de personnes, c'est-à-dire ne pas nécessiter trop de ressources au départ (temps, argent, connaissances). Si besoin les fiches peuvent se décliner en plusieurs étapes (pour les néophites, puis pour les gens ayant plus de ressources).


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