La sexualité et sa répression dans les sociétés primitives, de B. Malinowski

(Payot, Paris, 1976. Première publication en 1927 (1924 pour les deux premières parties))

Malinowski est véritablement le premier ethnographe moderne : il est le premier à séjourner pendant une longue durée (au moins deux ans) au sein d’une ethnie indigène dont il décrit en profondeur tous les aspects de la vie sociale et individuelle. Cette position et les données qu’il a recueilli ainsi que son intérêt pour la psychanalyse (il a lu un certain nombre d’œuvres de Freud pendant son séjour chez les Trobriandais !) donnent un grand intérêt à cet ouvrage.
Il est convaincu que la psychanalyse peut apporter des éclairages importants à l’anthropologie, toutefois il ne partage pas toutes les idées développées par Freud et ses disciples.

Résumé du livre :

Pour Malinowski l’approche psychanalytique est insuffisante, il faut tenir compte des conditions sociales. Le principal mérite de la psychanalyse est de permettre d’établir un lien entre biologie, psychologie et sociologie. Le problème central qu’elle étudie est le complexe familial qui pour Malinowski résulte de l’action qu’un type de groupement social exerce sur l’esprit humain. Comment se forme-t-il ? Quelle influence exerce-t-il sur la culture, l’organisation sociale, les mythes… telles sont les questions auxquelles il se propose de répondre.

Dans la première partie (« La formation d’un complexe ») Malinowski compare les relations familiales aux différents ages (de la naissance à la maturité sexuelle) entre la société matrilinéaire des Trobriandais, la classe bourgeoise de la société patriarcale occidentale et la classe paysanne de cette même société.
Il fait notamment ressortir des convergences et divergences entre l’intérêt biologique et les coutumes. Il en conclu que chez les Trobriandais il existe un complexe familial d’une nature différente de celle observée chez les « civilisés ». Ainsi, pour lui, les théories de Freud ne s’appliquent pas seulement à la psychologie humaine, mais aux modifications de la nature humaine, en rapport avec les diverses organisations sociales.

Dans la deuxième partie (« Le miroir de la tradition ») Malinowski recherche des manifestations de l’inconscient exprimée dans des faits sociaux à travers l’étude de quelques mythes, rêves, actes, obscénités et des troubles mentaux apparents.

Dans la troisième partie (« Psychanalyse et anthropologie »), publiée après que le psychanalyste freudien Jones ait critiqué les deux premières parties de son ouvrage, Malinowski s’oppose à la place et aux rôles que Jones et Freud attribuent au complexe d’Œdipe. Il leur reproche de séparer psychologie et sociologie, tandis que lui plaide pour une collaboration entre psychanalyse et sociologie.
Il examine le problème de l’origine de la civilisation en tant que passage de l’animal à l’humain.
Pour Malinowski le complexe d’Œdipe apparaît comme une preuve de l’inadaptation à la structure familiale patriarcale.
De plus on ne peut séparer les affects inconscients de ceux qui sont conscients. Ainsi le complexe nucléaire familial lui apparaît comme une configuration de sentiments au sein de la famille, propre à une société donnée.

Dans la quatrième partie (« Instinct et culture ») Malinowski introduit la notion de plasticité des instincts humains. C’est la détermination effective des comportements par des facteurs culturels, par opposition au déterminisme qui régit les instincts animaux. Elle est pour lui la condition de l’émergence de la culture. Les dispositions sociales suppléent à la disparition des instincts. Elles reflètent les aspirations instinctives et les anticipent. La spécificité de l’être humain c’est la durée de l’attachement familial lié à la nécessité d’une éducation culturelle.
Malinowski s’oppose à la conception freudienne de l’origine du désir incestueux. Pour lui l’inceste est prohibé car il est incompatible avec des rapports familiaux de subordination nécessaires à la transmission d’un apprentissage. Ces rapports familiaux servent de modèle pour les autres structures sociales.
En définitive le complexe familial n’est pas une cause originaire, comme le soutiennent les freudiens, mais un sous-produit de la culture, un symptôme d’inadaptation.

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