Aujourd'hui, la sexualité se retrouve prise entre le marteau et l'enclume. D'un coté la pornographie, qui se fait passer pour une expression de la liberté sexuelle, et de l'autre une pudibonderie qui se manifeste sous la forme d'un contrôle sans précédent de tout ce qui touche à la sexualité humaine - particulièrement : la sexualité infantile - doublée d'une censure d'autant plus efficace qu'elle n'est pas identifié comme telle (dissimulée sous divers prétextes éducatifs, sanitaires ou sécuritaires). Or, comme nous allons le voir, cette opposition est factice. Elle repose sur l'illusion que la pornographie est porteuse de liberté, alors qu'il s'agit en réalité d'un dispositif de répression sexuelle. Il n'y a donc pas opposition entre pornographie et pudibonderie, mais bien complémentarité entre deux formes de répression. Leur opposition factice est un piège qui permet de maintenir la répression sexuelle sur la masse des individus en les empêchant de penser la réelle liberté sexuelle. Celle-ci découle de l'autorégulation, principe central de l'économie sexuelle (théorisée par Wilhelm Reich). Cette liberté sexuelle est une condition nécessaire à toute action politique émancipatrice.
Au début du XXème siècle
Freud "découvrit" la sexualité infantile. Les enfants ont une activité
sexuelle (à comprendre au sens le plus large du terme) depuis leur
naissance. Par exemple : ils ne têtent pas seulement le sein maternel pour
se nourrir
mais aussi, une fois rassasiés, pour le plaisir. Le développement de
leur sexualité passe par différents stades et s'accompagne de la découverte
de leur corps et du plaisir qui résulte des caresses. La masturbation
est une activité importante de maturation sexuelle. Après avoir découvert
son propre corps, l'enfant tourne ensuite son intérêt vers celui des
autres et recherche la vue et le contact des autres (exhibitions et caresses
réciproques : il "montre ses fesses" ou "joue à touche-pipi").
Au sein de la société pudibonde du XIXème et
du début du XXème, cette
"découverte" fit scandale et fut le principal motif de rejet de la
psychanalyse naissante. Petit à petit pourtant cette évidence finit
par être largement reconnue, et on put croire, mai 68 aidant, que cela
serait définitivement acquis. Or nous assistons aujourd'hui à une régression
considérable sur ce point ; en même temps que la psychanalyse se trouve
de plus en plus contestée et marginalisée - au fond toujours pour cette
même raison : la mise en évidence de la sexualité infantile (même
si cette raison reste généralement inavouée). (Le comportement des
psychanalystes n'est d'ailleurs pas étranger à ces attaques. Lire la
page : Qu'ont-ils fait de Freud, le révolutionnaire
?).
C'est sur les enfants que la répression sexuelle fait le plus de dégâts. Au niveau individuel, les conséquences en seront le développement de névroses ou d'un caractère antisocial "pestiféré" (au sens de peste émotionnelle), des difficultés à être autonome, etc. Mais les conséquences d'une répression sexuelle généralisée sont d'ordre politique. Lire la page : répression sexuelle, exploitation et fascisme.
Notons au passage que la répression de la masturbation est relativement récente : elle n'apparaît qu'à partir du milieu du XVIIIème sous l'impulsion de certains médecins (Samuel Tissot 1730) et se développe surtout au XIXème. Elle se justifie dès le départ par des arguments économiques : la masturbation dissiperait l'énergie dont l'homme a besoin pour travailler. Le capitalisme était en plein essor ! Voir le film documentaire M la maudite, de Jean-Paul Fargier, 2007. La répression de la masturbation, et plus généralement la pudibonderie, sont des caractéristiques intrinséques de la société bourgeoise.
La répression brutale et directe de la sexualité n'a pas disparu dans notre société. Elle s'applique aux enfants, tout spécialement à l'école primaire.
Elle s'y justifie depuis longtemps au nom d'une prétendue "période
de latence" qui ferait que - naturellement - les enfants cessent toute activité
sexuelle entre 6 et 11 ans. Or les études ethnographiques ont montré
que dans d'autres sociétés il n'en est rien. (Même chez nous, les expériences de Jules Celma suffisent à invalider cette hypothèse.)
La "latence" que
l'on observe est une conséquence directe de la répression
qui s'abat sur l'enfant dès sa rentrée au cours préparatoire.
L'enfant
qui n'a pas intégré cette répression au sein de sa famille (ou à l'école
maternelle) se livrera naturellement à des activités sexuelles dans
l'enceinte de l'école (masturbation, exhibition, touche-pipi, etc.)
et, surpris
par les adultes, sera réprimandé. Dans le contexte général de répression
qui est le nôtre, cela suffira à lui faire intégrer l'interdit sexuel
- et l'angoisse qui l'accompagne. Dès lors, comme ses camarades, il
trouvera que "le
sexe c'est dégoûtant".
Cette répression est parfois justifiée par le fait que l'enfant
doit "sublimer" son
énergie (sexuelle) pour l'investir dans ce qui fait l'objet de l'apprentissage.
Or cette conception est totalement erronée.
La psychanalyse freudienne a montré que - tout au contraire - l'enfant
sexuellement réprimé voit généralement sa curiosité et sa spontanéité
inhibées ainsi que ses capacités d'apprentissage
et d'autonomie
réduites.
En effet la culpabilité sexuelle inhibe la curiosité et de plus l'enfant
consomme son énergie à refouler ses pulsions
sexuelles.
Il faut ajouter à cela que les méthodes pédagogiques dominantes sont totalement inadaptées à l'épanouissement de l'enfant, au développement de sa soif de savoir et de son autonomie. Alors même qu'il existe des méthodes alternatives. Cette pédagogie en apparence inadaptée, est en fait tout à fait adaptée à la formation d'individus soumis et dépendants, elle est nécessaire à l'ordre social, au système politique de la domination. L'école n'a jamais eu pour but de former des citoyens ! Lire la page éducation et répression.
Mais aujourd'hui la pseudo-justification de la nécessité de la répression en vue de l'apprentissage est en passe d'être remplacée par une autre, bien plus grave : il est désormais souvent considéré que les activités sexuelles infantiles sont des faits anormaux, pathologique, voire criminels !
En effet lorsque qu'un enfant est surpris en train de se livrer à des activités sexuelles, il peut arriver qu'il soit signalé comme cas pathologique (et donc fiché) ce qui peut mener à une enquête sociale de la "police des familles". Lorsque deux enfants sont surpris ensemble, l'activité sexuelle peut être considérée comme une agression de la part de l'un des enfants. Il est arrivé que des parents portent plainte ! Et, ce qui est pire, les institutions scolaires et judiciaires prennent cela au sérieux.
L'ambiance de chasse
hystérique aux "pédophiles" a un effet désastreux sur l'école. Les enseignants vivent dans la paranoïa
d'une dénonciation délirante, véritable Épée de Damoclès, qui les exposerait
au "lynchage". Tétanisés, ils n'osent plus toucher les enfants (ainsi un enfant qui
pleure n'obtiendra aucun réconfort...). Les nouvelles générations d'instituteurs
sont de toute façon formés pour éviter tout contact, ils intègrent eux-mêmes
l'interdit du toucher. Par voie de conséquence, les enfants eux-mêmes
sont réprimandés s'ils se touchent entre eux d'une façon tendre. (Par
contre les coups et les insultes sont toujours le lot quotidien des cours
de récréation.)
Naturellement, priver un enfant de tout contact physique pendant une bonne
partie de la journée (celle où il apprend les relations sociales) a
des
conséquences néfastes pour lui, tant du point de vue physiologique que
psychologique. Sur la façon
dont les enfants sont touchés et sur les conséquences, lire deux extraits de La peau et le toucher de Ashley Montagu, quatre extraits divers regroupés dans les leçons de maternage, dont un cours extrait de Freud sur la phobie du toucher.
Mais les conséquences de l'ambiance actuelle ne s'arrêtent pas là. Au delà
de l'interdit du toucher, c'est le discours sur la sexualité lui-même qui
est banni. Là encore les instituteurs n'osent plus rien dire sur le sujet.
Lire ce fait
divers à propos d'une tentative de prévention des agressions
sexuelles par l'information.
On voit à travers l'exemple significatif de l'école en quoi la récente obsession du "pédophile" joue en réalité le rôle d'arme de répression de la sexualité infantile et de censure indirecte du discours d'éducation sexuelle. Cette obsession, dont les médias sont largement responsables, reflète une tendance fondamentale de notre société : une régression pré-freudienne.
L'éducation sexuelle est prévue par le législateur, tout au long de la
scolarité. Lire la circulaire (de 2003) rendant obligatoire l'éducation sexuelle
à l'école.
Mais qu'elle en est l'objectif et qu'en est-il dans les faits ?
Un texte édifiant sur les visées du législateur : satisfaire la curiosité du jeune pour retarder le passage à l'acte :
En 1948 on réunit un comité qui publia le « Rapport du Comité d'études concernant l'éducation sexuelle dans les établissements d'instruction publique >> (une cinquantaine de pages). Ce comité était présidé par M. Louis François (inspecteur général) et réunissait des enseignants, des médecins et des représentants d'associations familiales. On y trouve déjà la distinction entre information et éducation sexuelle. Le comité déplore I'exclusion de I'anatomie et de la physiologie de la reproduction humaine des programmes de sciences naturelles et de biologie.
Il préconise une introduction progressive de ces « matières » aux programmes. Toutefois il émet des réserves sur les choses à dire et à ne pas dire selon qu'on se trouve face à un auditoire mixte ou homogène.
Pour la partie « éducation sexuelle » quelques citations choisies dans ce document illustreront l'idéologie qui le sous tend :
- L'esprit dans lequel cela doit se faire. « C'est déjà beaucoup, dans ce but que d'avoir un suffisant respect de soi-même (de celui qu'on a l'ambition d'être) et des femmes (de celles parmi lesquelles on choisira sa compagne d'existence) ; que d'avoir le plein sentiment de ses responsabilités en face des accidents et des catastrophes provoqués par l'aventure amoureuse hors du mariage ».
- La personnalité du maître.« Il sera, en tout cas, nécessaire que l'éducateur soit informé mais encore soit d'une dignité de vie parfaite donnant l'exemple de cet équilibre dont il a pour mission de favoriser l'établissement chez ses élèves ».
- Les buts de cet enseignement « Il importe de noter qu'en réalité cet enseignement des phénomènes de la reproduction est le contraire d'un enseignement véritable. Son objet est, en effet de détourner l'attention du sujet des questions qui lui sont exposées afin que la curiosité de savoir une fois satisfaite ne puisse irriter la curiosité d'éprouver. » « Le but poursuivi étant d'aider l'adolescent à se faire une existence saine et heureuse, d'aider le jeune homme à fonder une famille saine et heureuse. ».
« ... détourner I'attention des élèves non par des interdictions formelles, mais en leur proposant des activités qui les passionnent et auxquelles ils se consacrent spontanément. ».
- Les avantages de la coéducation : « La tension sexuelle est atténuée par le fait que l'affectivité normale reçoit des satisfactions constantes ; l'évolution sexuelle serait même plus lente dans le cas de la coéducation ».
Extrait de "Education sexuelle répression nouvelle" par Alain Giami, revue Sexpol n°9, page 31. (Passages soulignés par nous.)
Ce texte, écrit en 1948, est-il encore d'actualité ? Malheureusement oui.
Preuve en est que le Ministère de l'Educastrons
Nationale
a récemment (2005) agréé, pour donner des cours d'éducation sexuelle,
l'association traditionaliste Familles
de France. Voir : mainmise
sur l'enfance. Une autre association intervient également en milieu scolaire depuis
plus longtemps : l'association Sésame. Nous en avons analysé en détail
le programme : ce qui en ressort est parfaitement conforme avec les visées
du texte de 1948 !
Sur les variantes mécanistes ou mystiques, lire le texte Education
sexuelle par Roger Dadoun (extrait de Cent fleurs pour Wilhelm Reich), écrit en 1975 et toujours parfaitement d'actualité. Voir aussi la F.A.Q.
: N'y a-t-il pas déjà de l'éducation sexuelle à l'école ?
De toutes façon, la circulaire concernant l'obligation d'éducation sexuelle est très peu appliquée dans les faits : sujet tabou dès qu'il s'adresse aux jeunes. Même si l'on ne considère que l'information sexuelle, les objectifs officiels - en terme d'horaires - ne sont pas atteint.
Note : l'information sexuelle se cantonne à transmettre des informations sur la biologie de la reproduction sexuée, sur l'anatomie des organes génitaux* et sur les méthodes de contraception et de prévention des infections sexuellement transmissibles.
* On cherche souvent vainement dans les ouvrages mention du clitoris ou s'il y est il n'est jamais dessiné dans sa totalité (partie interne) et sa fonction n'est guère évoquée. Voir le film Le clitoris, ce cher inconnu, de Variety Moszynski, 2003.
"L'absence d'éducation sexuelle est une forme sournoise et forte d'éducation à l'absence de sexualité."
Roger Dadoun, dans Cent fleurs
pour W.Reich § éducation sexuelle.
Et c'est pourquoi à partir du collège (voire même avant) l'éducation sexuelle se fait en réalité par la pornographie.
Si on a pu croire au moment de la légalisation que la pornographie serait l'expression d'une libération de la sexualité, force est de constater qu'il n'en a pas été ainsi. De plus par rapport aux années 1970, la pornographie a changé de style pour devenir de plus en plus mécanique, sexiste et violente.
Une page détaillée y est consacrée : La pornographie, une hypocrisie organisée.
Pour résumer : la pornographie ultra-dominante contemporaine, bloque et
formate les fantasmes. Présentant des corps artificialisés, dans des
rapports mécaniques et morbides, elle constitue une antithèse de la
sexualité qui est pulsion de vie. De plus elle réactive le dualisme
réactionnaire qui classifie les femmes en deux catégories : les filles
respectables
(les "mamans") et les salopes (les "putains") véritables "trous à bites".
On peut dire que la pornographie
rend aveugle à la sexualité. Or, d'un accès très aisé, elle constitue
l'éducation sexuelle de fait pour la grande majorité des jeunes d'aujourd'hui.
Elle est bien souvent l'unique modèle de la sexualité.
La pornographie peut aussi être vue comme l'un des symptôme d'une société
malade de sa sexualité.
La pornographie remplit de plus une fonction idéologique : elle donne l'illusion que le libération sexuelle est advenue, en se présentant comme son expression. Elle contribue à l'illusion de l'épanouissement sexuel : en effet, les individus pourront d'autant plus demeurer dans le déni de leur état (bridé, réprimé, inhibé) qu'ils regardent et imitent la pornographie, vue comme signe de liberté sexuelle. La pornographie masque la répression sexuelle réelle (et la misère sexuelle qui en découle) et donc, ne la percevant plus consciemment, les gens ne peuvent s'y opposer. Lorsque seul régnait l'interdit, il n'y avait pas d'illusion possible. Les pulsions sexuelles poussaient les individus à rivaliser d'ingéniosité pour contourner censures et interdits (avec parfois de grand risques).
La pornographie n'est pas seule à véhiculer cette illusion. Les enquêtes statistiques sur la sexualité contemporaine (officielles - ex : l'enquête CSF 2006 - ou non) menées à l'aide de questionnaires orientent leurs conclusions dans le même sens : les individus seraient plus épanouis sexuellement et il n'y aurait plus de tabou. La preuve : ils le disent... et en plus ils pratiquent plus souvent la sodomie !
Ce type d'enquête n'a en réalité guère de validité scientifique, ou plus précisément elles ne renseignent que sur les normes du discours (ce qu'il convient de dire) en matière de sexualité. Or ces normes consistent précisément à se dire "sexuellement épanoui", être inhibé est innavouable (cette forte contrainte normative résulte justement de l'existence d'une répression de la sexualité). Les magazines "féminins" et la banalisation des images pornographiques y sont sans doute pour beaucoup.
Seuls des entretiens cliniques approfondis menés par des professionnels (pour autant qu'ils ne soient pas eux-même formatés par l'idéologie médicale) peuvent donner un regard fiable sur la sexualité contemporaine.Le discours "officiel", c'est-à-dire autorisé, sur la sexualité est le discours médical (scientiste). En s'emparant du champ de la sexualité (à la fin du XVIIIème) le discours médical a permis la prise de contrôle de la sexualité par les autorités, notamment en édictant des normes sur ce qui est "normal" et ce qui est "pathologique". Lire à ce sujet Histoire de la sexualité de Michel Foucault.
En réaction à la déferlante pornographique, on observe... un retour des pudibonds. Ce mouvement nous vient des U.S.A. (ainsi dans le cours de santé pour les adolescents, les enseignants sont obligés de présenter l'abstinence comme la meilleure façon de se préserver des infections sexuellement transmissibles) Mais il gagne maintenant l'Europe. Et en France une association catholique intégriste vient d'être agréée par l'Éducation Nationale pour assurer des cours d'éducation sexuelle dans l'enseignement public (voir Mainmise sur l'enfance).
Ce retour de la pudibonderie se traduit par un retour à des valeurs réactionnaires telle que la valorisation de la virginité. Mais dans le contexte actuel cela donne des comportements absurdes : par exemple des jeunes filles qui se font sodomiser pour conserver intacte leur virginité (!) pour le mariage. Ou encore d'autres mettent leur virginité aux enchères sur Internet (forcément très cher puisqu'elle est valorisée !). La logique capitaliste s'accomode très bien de ces valeurs réactionnaires.
L'épidémie de Sida, dont les origines sont douteuses, est venue à point nommé pour soutenir cette contre-offensive, en réintroduisant l'angoisse dans la relation sexuelle.
On voit aussi les seins nus disparaître des plages (sous le prétexte - qui ne trompe pas - de prévention des brûlures solaires, mais aussi plus franchement en invoquant la "pudeur", concept qui - lorsqu'il se réfère à la nudité - appartient bien à l'univers pudibond). Et bien sûr l'épilation intégrale (comme dans les films pornos...) accompagne ce mouvement d'aseptisation de la sexualité.
Pornographie et pudibonderie se nourrissent l'une de l'autre. Face aux
interdits de la pudibonderie, la pornographie se proclame "liberté"
et face à la violence pornographique la pudibonderie se proclame "morale".
Elles sont indissociables et prospèrent de concert.
Et,
comme nous venons de le voir, ces deux approches de la sexualité sont
toutes les deux répressives. Elles sont en réalité les deux faces
d'une même pièce. Leur opposition factice piège la pensée dans une
fausse alternative. On est alors tenté de choisir l'un ou l'autre camp
ou de se situer entre les deux. Mais être entre deux pôles répressifs
c'est toujours être dans la répression. Les
individus sont d'autant plus facilement piégés dans cette alternative
qu'au cours de leur développement ils n'ont connu que ces deux aspects,
passant
de l'interdit de l'école primaire à l'éducation par la pornographie au
collège.
On peut distinguer deux
discours d'éducation sexuelle, correspondant à deux versions de la
pudibonderie : le discours mystique (qui pose l'amour - menant à la
fondation d'une famille avec enfant - comme condition du rapport sexuel*)
et le discours mécaniste (le discours médical, normalisateur - duquel
on
peut rapprocher
les
images
anatomiques
du
porno).
* Et non le désir sexuel comme créateur du sentiment amoureux !
Ainsi il devient très difficile de concevoir une sexualité qui ne soit pas réprimée, une sexualité en accord avec notre biologie.
Aux systèmes répressifs de tous ordres, s'oppose l'autorégulation de la sexualité. Celle-ci se produit naturellement lorsque - dans la société - la sexualité n'est ni interdite, ni formatée, ni médicalisée, ni mystifiée. Cette autorégulation - des pulsions (de l'énergie) sexuelles - est fondée sur "la capacité naturelle d'aimer" (W.Reich).
Wilhelm Reich a théorisé ce principe sous le nom "d'économie sexuelle". L'économie sexuelle est tout à la fois un principe biologique, psychologique et politique (social et économique). Extrait :
"En raison de la cassure qui s'est produite dans la structure caractérielle de l'homme d'aujourd'hui, on tient pour incompatibles la nature et la culture, l'instinct et la morale, la sexualité et l'accomplissement de soi. Cette unité de la culture et de la nature, du travail et de l'amour, de la morale et de la sexualité, que l'humanité attend depuis toujours, cette unité restera un rêve aussi longtemps que l'homme ne permettra pas la satisfaction des exigences biologiques de l'accomplissement sexuel naturel (orgastique). Jusque-là, la vraie démocratie et la liberté responsable demeureront une illusion, et la soumission sans espoir aux conditions sociales existantes caractérisera la vie humaine ; l'anéantissement de la vie prévaudra, ne fût-ce que dans l'éducation obsessionnelle, dans les institutions sociales obsessionnelles, ou dans les guerres." Wilhelm Reich, extrait de l'introduction à La fonction de l'orgasme, 1945.
Le programme qui découle de l'économie sexuelle ne saurait en aucun cas se limiter à un programme d'éducation sexuelle, car l'économie sexuelle est en interdépendance avec les conditions politiques de la société. Remettre en cause la politique sexuelle actuelle, c'est nécessairement remettre en cause le système social, économique, politique, idéologique. L'économie sexuelle est donc un projet révolutionnaire.
Plutôt que d'une éducation sexuelle, c'est d'une "éducation sexuée" (pour reprendre le terme de Georges Mauco, Éducation et sexualité, 1975) dont nos enfants ont besoin. C'est à dire l'opposé de ce qui se pratique actuellement au sein de l'Educastrons Nationale. En effet cela n'aurait guère de sens de faire de l'éducation sexuelle dans un milieu (l'école) qui réprime fortement la sexualité.
Informer sur les principes de l'économie sexuelle, afin : - de détruire l'illusion que la pornographie soit une expression de la liberté sexuelle ; - de faire prendre conscience de l'impasse de l'opposition pornographie vs pudibonderie ; - et ainsi de mettre en échec ces deux formes de répression.
Informer sur les fonctions multiples de la sexualité humaine
: - reproduction ; - plaisir et équilibre énergétique (et psychique)
; - relationnelle.
Voir notre proposition de cours
d'éducation sexuelle.
Lutter contre la répression de la sexualité infantile : - former les parents, les enseignants et encadrant des écoles, et d'une manière générale toute personne qui a des enfants sous sa responsabilité, aux réalités de la sexualité infantile ; - lever les interdits et les tabous qui empêchent d'aborder cette question de façon rationnelle.
Ouvrir le huis-clos de la famille traditionnelle - creuset des névroses et de la soumission à l'autorité - notamment par le développement de nouvelles formes d'habitat, plus communautaires. Assurer aux jeunes les moyens matériels pour pouvoir vivre dans de bonnes conditions leurs expériences amoureuses et sexuelles. Promouvoir les relations amoureuses sous toutes leurs formes.
S'opposer aux logiques de profit et de soumission, tant individuellement que collectivement.